À la fin du IVè siècle et au début du Vè, l’Empire romain a été confronté à un vaste mouvement migratoire venu de l’Est et initié par les Huns : ce furent ce qu’on appelle les invasions barbares. L’Empire, sans doute trop vaste et déjà sur le déclin, n’a pu ni protéger ses frontières ni intégrer ces nouveaux peuples. Mais l’administration romaine a finalement tenu le choc : ces différents peuples ont pu se créer des royaumes dans des frontières déjà établies et sur des fondations administratives existantes. C’est ainsi que naquit par exemple le royaume des Goths en Italie
La Sarmatie a rapport à l’histoire, à l’archéologie et aux mythes fondateurs. Pour Strabon, il s’agit de « nations innombrables » nomades sur des territoires géographiquement mal définis entre Europe et Asie. L’archéologie a retrouvé des traces de cet « Empire des steppes » (R. Grousset) qui était tout sauf un empire organisé. Contrairement aux Scythes, la littérature antique est pauvre à ce sujet. Il s’agit de peuplades composées de guerriers, auxquels se joignent de commerçants et des artisans experts dans l’art du métal. Dans cette société, la femme a un rôle important, outre ses fonctions naturelles : elle est guerrière, mais aussi dotée de pouvoirs politiques et religieux. On pense aux Amazones décrites par Hérodote. Les cavaliers sarmates sont redoutés des Romains qui les intègrent ensuite dans leurs armées ; leurs cuirasses métalliques, leurs bannières au vent imitant les dragons sont là pour effrayer l’ennemi : c’est ainsi que les décrit Arrien pour la période précédente. L’art sarmate animalier et symbolique (armes, miroirs, etc.) est connu par l’archéologie. Il y aussi un « or » des Sarmates (exposition de 1995). On situe donc l’apogée des Sarmates, à la suite des Scythes et avant les invasions des Huns au deuxième siècle de notre ère, et leurs territoire d’errance semble aller de la Baltique a la mer Noire. Ovide, exilé par Auguste sur les rives du Pont-Euxin (la mer Noire) dans la Roumanie actuelle, évoque dans un poème des _Tristes_ (V, 7) la sauvagerie et la férocité des Sarmates : la pureté de sa langue latine s’ensauvage de termes barbares… A la fin du Moyen Âge, le mythe sarmate apparaît en Pologne. En 1555, Kromer voit dans la Pologne une origine sarmate contre l’avis de Miechowa (1517) qui distinguait les Polonais des Scythes et des Sarmates pour en faire des Européens (catholiques) contre les Moscovites soupçonnés de vouloir établir la troisième Jérusalem orthodoxe. L’identité sarmate est curieusement évoquée en latin, la langue de Rome, pour justifier un patriotisme religieux qui sépare les Sarmates des Slaves. La noblesse polonaise voit dans les Sarmates sa propre origine, différente de celle du peuple : le système de la Diète, le _liberum veto_ (loi de l’unanimité), l’élection du roi, ses propres privilèges sont justifiés par le mythe des traditions sarmates. On réinvente des traditions, comme le costume sarmate (inspiré des vêtements persans et turcs réels…) et l’habitude de se raser le crâne : les nobles se font peindre dans cet accoutrement. Les Lumières vont se trouver en porte à faux avec cette idéologie. Le théâtre polonais du XVIIIe siècle critique à l’occasion le sarmatisme (Rzewuski inspiré d’Hauteroche). Mais les trois partages (1772, 1793 et 1795), qui vont faire disparaître la Pologne dévorée par la Russie, l’Autriche et la Prusse, amènent une revalorisation du sarmatisme. La Confédération de Bar, révolte de la noblesse contre le roi réformateur et pro-russe Stanislas-Auguste Poniatowsli (voir la thèse de Jean Fabre) favorise cette renaissance, à laquelle s’associe Jean-Jacques Rousseau sollicité par les confédérés de proposer une constitution à la Pologne… Après la disparition pour plus d’un siècle de la Pologne comme état souverain, le sarmatisme sera associé à la nostalgie d’un âge d’or (W. Pol). Vont alors renaître les théories des confins visant à distinguer une Pologne européenne des ennemis aux frontières : Tatares, Turcs, Russes… En France, la Pologne apparaît vraiment dans l’imaginaire des représentations des peuples avec l’élection en 1573 de Henri de Valois, futur Henri III, au trône de Pologne. Toute une littérature hagiographique se déchaîne. La même année, Blaise de Vigenère adapte Kromer en français. Jean Bodin voit dans le système politique polonais un intéressant modèle. Mais d’aucuns comme André Thevet évoquent les monstres qui rodent dans la « mer Sarmatique » (Baltique), et l’évêque de Valence, Monluc, le poète Desportes, qui a accompagné le roi en Pologne, Ronsard lui-même témoignent de leur désillusion. Le huguenot Agrippa d’Aubigné est, lui, favorable aux Polonais qui ont su éviter les guerres civiles entre sectateurs des diverses religions. Au XVIIe siècle, deux reines françaises règnent sur la Pologne. Il y une mode sarmate, que l’on retrouve dans l’œuvre de Jean-Pierre Camus (_L’Iphigène_), de Jobert (_Balde, reine des sarmates_) ou au théâtre : Gilet de la Tessonerie, Hauteroche,et surtout le _ Venceslas_ de Rotrou qui bénéficiera d’un succès durable jusqu’au siècle suivant. Au siècle des Lumières, l’ambivalence du Sarmatisme s’accentue de nouveau. L’article _Pologne_ du chevalier de Jaucourt dans l’_Encyclopédie_ (1765) est très critique et oppose l’instinct sauvage de la nation aux peuples policés de l’Ouest. De son côté, Voltaire ne voit dans le sarmatisme qu’anachronisme mâtiné de superstitions catholiques. Au contraire de Rousseau comme on l’a dit ou de Marat qui exalte la résistance des Sarmates pour défendre leur liberté ; Mably y associe le patriotisme républicain. Les relations de voyages ne sont pas exemptes de cette mythification. Si au XVIe siècle et encore largement au siècle suivant, les relations de voyages faits dans un cadre officiel dominent et apportent peu, la relation du jeune Jean-François Regnard dans la seconde moitié du siècle prouve un regard plus original : s’il admire l’harnachement à la sarmate des hussards polonais, il n’en remarque pas moins le servage dans lequel la noblesse polonaise maintient l’essentiel d’une population composée de paysans. Si l’on prend deux exemples seulement dans la vaste littérature des voyages en Pologne du XVIIIe siècle (Michel Marty, Voyageurs français en Pologne durant la seconde moitié du XVIIIe siècle. Écriture, Lumières et altérité, Paris, Honoré Champion, 2004, 384 p.), on remarque que, pour l’ex-jésuite Vautrin devenu précepteur en Pologne, ce pays est d’abord celui de l’exil, il critique les aspects sociaux du sarmatisme et la généalogie mythique des origines sarmates des Polonais qu’il lie plutôt à celles des Russes…Le marquis de Caraccioli, lui aussi précepteur, fait au contraire l’éloge de la liberté polonaise. Le XIXe siècle sera celui de la Pologne martyre dans l’esprit de l’intelligentsia française. Les insurrections (écrasées) de 1831, 1861 soulèvent l’enthousiasme d’écrivains comme Hugo, Maupassant, voire la comtesse de Ségur. Au XXe siècle, le titre même de l’ouvrage de Pierre Dumeril _Chez nos amis les Sarmates, voyage à travers la Pologne moderne _ est largement oxymorique… Du topos sarmate combiné à la nostalgie et au sentiment des confins naît un composé qui semble survivre entre Baltique et mer Noire.
La Sarmatie
Sarmates, Taifales, Marcomans et autres migrants
En raison de la période et de l'aire géographique concernées, plusieurs cultures ont été attribuées aux Sauromates protohistoriques et aux Sarmates : entre autres, culture de Prokhorovka et « culture sarmate moyenne » (iie siècle av. J.-C.). Certains traits, toutefois, sont caractéristiques. La culture sarmate des origines semble avoir conféré une importance particulière aux femmes. De nombreuses tombes féminines richement décorées et dotées d'armes corroborent cette idée pour les vie et ve siècles av. J.-C. Au iie siècle, une reine sarmate, Amagê, est connue, indiquant peut-être une permanence de ce trait culturel. D’après Hérodote13, les femmes sarmates suivaient leurs maris à la chasse et à la guerre, et s'habillaient comme eux.
À l'époque romaine, la célèbre cavalerie lourde sarmate14 (des lanciers cataphractaires, notamment représentés sur la colonne Trajane) témoigne de l'importance de la culture guerrière de ce peuple.
Héritage[modifier | modifier le code]
Le nom des Sarmates est à l'origine de nombreux toponymes. En Dacie, on leur doit le nom de la cité de Sarmizegetusa. Dans l'Empire romain d'Occident, les noms de Sermizelles (Sarmisolaxiie siècle), Salmaise, Sermaise, Sermaize, Sermoise et quelques autres, qui remontent tous à un primitif Sarmatia (fundum ou villa), témoignent de la présence de Sarmates déditices en Gaule belgique et Gaule lyonnaise antiques15.
Les géologues et les paléo-géographes appellent « mer Sarmatique » l'étendue d'eau recouvrant, au Cénozoïque, les actuelles mer Noire, Ukraine, Sud de la Russie, mer Caspienne et mer d'Aral. Les géographes appellent « Sarmatie » la grande plaine polono-biélorusse où se tient la forêt de Białowieża.
Plusieurs orthographes désignant les peuples sarmatiques existent dans la bibliographie :
- Roxolanes, Roxelanes, Roxolans (à l'origine des prénoms Roxane, Roxelane, Oxana...) ;
- Jazygues, Iaziges, Yazyges, Lazygues ;
- Iasses, Jasses, Jaszones, Jassics.
Sur le plan militaire, et par l'intermédiaire des Goths qui furent influencés par leur mode de combat, les Sarmates seraient à l'origine de la cavalerie lourde16.
Dès Hérodote, les Sarmates sont associés à la légende des Amazones. Celle-ci dérive peut-être d'un statut particulier qu'avait la femme dans leur société.
Un mouvement culturel polonais, appelé sarmatisme, fondé sur l'ancienne croyance selon laquelle la Szlachta (noblesse polonaise) avait une origine sarmate se répand de la fin du XVIe jusqu’à la deuxième moitié du XVIIIe siècle dans la République des Deux Nations. Cette culture, baroque, exerce alors une influence considérable sur les mœurs et l'idéologie de l'aristocratie polonaise. Elle influence aussi la littérature baroque sous la Rzeczpospolita.
En géologie, un paléocontinent protérozoïque correspondant au socle rocheux situé au nord de la mer Noire a été appelé Sarmatia d'après le peuple des Sarmates.
Reprenant une thèse sur les origines historiques de la légende arthurienne17, le film Le Roi Arthur, réalisé en 2004 par Antoine Fuqua, présente une version qui fait d'un groupe d'enrôlés Sarmates les premiers chevaliers de la table ronde.
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Certains groupes de Sarmates obtiennent de Rome le statut de fédérés (alliés pouvant résider dans l'empire contre service militaire, par fœdus, traité) pour protéger les camps situés sur la voie Agrippasur l'axe Rome-Boulogne-sur-Mer tel que celui de Cora dans l'Yonne. Trois des cinq villes nommées Sermaise en France doivent leur nom à ces différents relais.
À la suite de nombreuses confrontations avec l’Empire romain, des lanciers sarmates sont recrutés par Rome au cours du iie siècle. L’intégration de ces unités auxiliaires se traduit par l’adoption de l'armement et des techniques militaires steppiques ainsi que par la création d’unités spécialisés. À partir du iiie siècle, une partie des Sarmates se soumet aux Goths. Dès lors, ils appartiennent à une coalition de peuples germaniques et non-germaniques, connue sous le nom de « culture de Tcherniakov » (aussi appelée « culture Sintana de Mures » par les archéologues roumains). À la fin duive siècle, sous la pression des Huns, certains groupes de Sarmates participent aux migrations et s'installent sur le territoire romain. La notice des Dignités (Notitia Dignitatum) mentionne une préfecture des Sarmates et des Taïfales en Gaule dans la cité du Poitou (Pictavis gallia) installés en tant que colons avec le statut de gentiles.
Période des Goths[modifier | modifier le code]
Une partie des Sarmates est soumise par les Goths entre 200 et 300. Au ive siècle, les principaux groupes sarmates sont alors les Roxolans et les Iazyges de Pannonie, à la frontière romaine, et lesAlains d'Ukraine et de Russie méridionale, voisins des Ostrogoths, les Taïfales.
En 376, les Sarmates de la mer Noire s'allient aux Huns pour détruire le Royaume des Goths puis participent aux invasions hunniques du ve siècle en Europe occidentale.
Identité des Xiongnu[modifier | modifier le code]
La question de l'identité des Xiongnu n'est pas résolue. Le sinologue français Paul Pelliot (1878 — 1945) considérait les Xiongnu comme desProto-Turcs. L'historien japonais Kurakichi Shiratori (Shiratori Kurakichi (白鳥庫吉 ), 1865 — 1942) les a considérés tantôt comme des Turcs, tantôt comme des Mongols. Pour le linguiste hongrois Louis Ligeti (en), ils ont pu être paléoasiatiques ou iénisséiens. Dans le dernier cas, ils pourraient être apparentés aux Khantys (Ostiaks), qui vivent en Sibérie occidentale et parlent une langue finno-ougrienne. Enfin, le sinologue américain Edwin G. Pulleyblank (1922 — 2013) a défendu une thèse selon laquelle ils étaient les ancêtres des Kets, un peuple sibérien parlant une langue isolée.
Quelques mots de vocabulaire des Xiongnu ont été conservés. Leur nom devait représenter la syllabe *kun. Le turcologue Louis Bazin l'a rapprochée du suffixe turc -gun, qui concerne les groupements humains. On peut aussi le rapprocher du mot mongol hün « homme », bien que les voyelles ne correspondent pas exactement. De nombreux peuples se sont appelés « les Hommes ». Il en serait de même des Xiongnu et ceci fournit un argument pour les considérer comme des Turco-Mongols. On sait aussi qu'ils pratiquaient le tengrisme, que leur désignation du ciel était apparentée au turc tängri et au mongol tengeree.
De nombreux historiens ont émis l'hypothèse que les Huns d'Attila, apparus au ive siècle en Europe, descendaient des Xiongnu ; c'est ce que suggère la ressemblance des noms. Elle n'est cependant pas certaine, puisqu'il est possible que les Huns aient pris leur nom aux Xiongnu sans avoir de lien de parenté avec eux. O. Maenchen-Helfen notamment a sévèrement critiqué la thèse de l'identité Huns-Xiongnu. Les derniers résultats de la recherche[réf. nécessaire] laissent cependant penser que ce lien était non seulement nominal, et donc politique, mais aussi culturel.
Différentes visions de l'appartenance aux différents peuples turco-mongols s'opposent. Les partisans de la théorie de la langue turque incluent E.H. Parker, Jean-Pierre Abel-Rémusat, Julius Klaproth, Kurakichi Shiratori, Gustaf John Ramstedt, Annemarie von Gabain, et Omeljan Pritsak1. Quelques sources disent que les classes dominantes étaient des proto-turques2,3 tandis-que d'autres suggèrent des proto-Hunniques. Craig Benjamin voit quant à lui les Xiongnu à la fois comme des Proto-turcs or des Proto-mongols, qui parlent probablement une langue liée au turc Dingling4.
Histoire[modifier | modifier le code]
Venus des steppe mongoles, les Xiongnu entrèrent dans l'histoire en -245, à l'occasion d'un affrontement contre le royaume de Zhao. La Chine était alors divisée en royaumes en conflit permanent. L'unification fut l'œuvre du roi de Qin, qui prit en -221 le nom de Qin Shi Huang. À cette époque, les Xiongnu semblent avoir été gouvernés par un homme que les Chinois appelaient Touman (頭曼,Tóumàn). Ce nom propre était apparenté au turco-mongol tümen « dix mille » : ce serait à l'origine un titre militaire (général d'une armée de dix mille hommes) interprété comme un nom propre par les Chinois de l'époque. Les attaques que Touman lança contre la Chine motivèrent la construction de la Grande Muraille. Mais les Chinois adoptèrent également contre eux une stratégie offensive : les Xiongnu furent vaincus par le général Meng Tian en -214.
Le successeur de Touman fut son fils aîné, appelé Modu (冒頓, ) par les Chinois. Il régna de -209 à -174, en portant un titre que les Chinois transcrivent par 撑犁孤涂單于, 撑犁孤涂单于, . La désignation turco-mongole du ciel est reconnaissable en chengli, prononcé *thrangrri en vieux chinois. Comme selon les Chinois gutu signifiait « fils », ce titre peut être traduit par « shanyu, fils du ciel ». La puissance des Xiongnu s'accrut considérablement sous le règne de ce souverain. Il réorganisa l'armée en introduisant une discipline stricte. Il créa aussi une cavalerie légère armée de puissants arcs composites (lesétriers n'existaient pas encore à cette époque). Son campement était situé au sud-est des monts Khangai, au centre de laMongolie.
En -200, les Xiongnu parvinrent à encercler Liu Bang, le fondateur de la dynastie Han. Deux ans plus tard, un traité de paix fut signé avec la Chine. Les Xiongnu reconnaissaient la souveraineté des Han sur tous les territoires au sud de la Grande Muraille, mais en échange les Han devaient donner une princesse en mariage au shanyu et fournir une grande quantité de soie, de produits artisanaux, de riz et d'or. C'est une sorte de tribut à payer pour avoir la paix.
Modu remporta une victoire contre les Yuezhi (月氏) en -176. Il s'agissait de Tokhariens, originaires de l'ouest de la province deGansu, qui avaient fondé le premier empire connu de l'Asie centrale. Selon une histoire peut-être en partie légendaire, Modu avait été envoyé en otage chez eux sous le règne de Touman. La victoire de Modu poussa les Yuezhi à émigrer vers le Tian Shan(monts Célestes), dans l'actuel Kirghizistan, et permit aux Xiongnu de contrôler trente-neuf États de l'Asie centrale. La plupart d'entre eux étaient situés sur la Route de la soie.
Laoshang (老上, ), le successeur de Modu, régna jusque vers -161. Continuant la politique de son père, il remporta une victoire définitive contre les Yuezhi, les poussant à émigrer vers laBactriane. L'empereur des Yuezhi fut tué et son crâne fut transformé en une coupe à boire.
L'empereur Wudi (漢武帝) de la dynastie Han envoya l'ambassadeur Zhang Qian (張騫) chez les Yuezhi pour obtenir leur alliance contre les Xiongnu. Comme Zhang Qian devait traverser le territoire des Xiongnu pour se rendre en Bactriane, il fut capturé par eux et resta dix ans prisonnier. Il s'échappa et arriva chez les Yuezhi vers -128, mais il échoua dans sa mission diplomatique. Sur le chemin du retour, il fut de nouveau capturé. Il ne resta prisonnier qu'un an, puis il revint en Chine.
Wudi infligea par ailleurs de sévères défaites aux Xiongnu. En -121, ceux-ci furent délogés du Gansu et ce territoire tomba définitivement dans le giron de la Chine. Ils se redressèrent à la fin du règne de Wudi, vers -90.
Leur empire commença à perdre sa puissance à partir de -80, avec la scission des Wusun, un puissant peuple nomade du Tian Shan qui avait été soumis lors de la victoire de Modu sur les Yuezhi. Deux autres peuples vassaux, les Dingling et les Wuhuan, se rebellèrent en -62. Plus tard, deux frères se proclamèrent shanyu et entrèrent en lutte. L'un d’eux, Huhanye, se soumit aux Chinois en -53et forma une sorte d'État tampon au sud de la Mongolie. Il put occuper le nord de ce pays en -48 et il mourut dans la région d'Oulan-Bator après avoir épousé en -33 la princesse chinoise Wang Zhaojun. Après la mort de Huhanye, les Xiongnu se scindèrent en deux factions et celle du Sud, constituée de huit tribus, fit définitivement allégeance aux Chinois. Elle s'installa dans l'actuelleMongolie-Intérieure. Dès lors, les Xiongnu commencèrent à devenir moins redoutables pour les Chinois. En 89 et en 90, ils effectuèrent encore quelques incursions en Chine, mais les troupes impériales les repoussèrent. Ils furent écrasés en 91 ; le shanyu s'enfuit et toute sa famille fut capturée et emmenée en Chine.
En 155, un chef du peuple xianbei (鮮卑), appelé Tanshihuai par les Chinois, fonda en Mongolie un puissant État et cent mille familles xiongnu se rallièrent à lui. Les Xianbei fondèrent par la suite ladynastie Wei du Nord (北魏) qui domina pendant plus d'un siècle l'ensemble de la Chine du Nord.
La société xiongnu[modifier | modifier le code]
Les Xiongnu étaient des pasteurs semi-nomades, éleveurs de chevaux et de bœufs. Ils utilisaient probablement déjà la yourte, habitation toujours en usage chez les nomades de l'Asie centrale. Ils construisaient des habitations semi-troglodytiques ; pratiquaient des chasses collectives et utilisaient des faucons. La terre était cultivée par les prisonniers de guerre : des Chinois ou des hommes originaires des oasis de l'Asie centrale. Ces captifs effectuaient également des travaux artisanaux.
D'après les sources chinoises, les Xiongnu étaient divisés en vingt-quatre tribus, elles-mêmes subdivisées en clans et familles patrilinéaires. Les principaux clans sont : Huyan, Xubu et Luandi. La société était divisée en classes, comprenant des aristocrates, divisés en une noblesse de sang apparentée au shanyu et une noblesse de talent, et des hommes du peuple. Autour du shanyu, au pouvoir héréditaire mais non absolu, gravitaient des princes répartis en différents grades. Le souverain ne pouvait prendre son épouse que dans un nombre limité de clans. Les Xiongnu pratiquaient la polygamie et le lévirat.
Plusieurs peuples étrangers avaient été intégrés dans l'empire des Xiongnu. C'est peut-être le cas des Huns, s'ils n'étaient pas identiques aux Xiongnu, et cela pourrait expliquer qu'ils aient porté le nom de leurs anciens maîtres. Il en était probablement de même des Hephthalites, considérés comme des « Huns blancs » alors qu'ils n'étaient certainement pas apparentés aux Xiongnu ou aux Huns.
Les Xiongnu avaient de véritables institutions judiciaires. Les criminels étaient jugés lors de procès qui ne duraient jamais plus de dix jours. Les punitions appliquées étaient l'exécution, la confiscation des biens ou la mutilation. La violation de la discipline militaire était punie de mort. Les soldats étaient répartis en unités de dix hommes. Dix de ces unités formaient une centaine, dix centaines formaient un millier et dix milliers constituaient ce que les Mongols appellent un tümän. C'était une organisation militaire très courante en Asie centrale. Les femmes montaient à cheval et participaient à des actions de défense ainsi qu'à l'entraînement des enfants.
Fouilles archéologiques[modifier | modifier le code]
L'anthropologue russe Yu. D. Tal’ko Gryntsevitch serait le premier, entre 1896 et 1902, à mener des fouilles sur les tombes des Xiongnu. En 1924 et 1925, l’expédition mongolo-tibétaine du capitaine soviétique Piotr Kouzmitch Kozlov met au jour d'importants vestige, en Mongolie septentrionale, en fouillant 12 kourganes de la nécropole de Noïn Ula (en). Les soieries et laques han, parmi lesquelles une coupe datée de la kourgane n°6 font penser qu'il s'agit d'une tombe princière. Cela pourrait être celle du chanyu Wuzhuliuoruodi mort en l'an 135.
Les deux sites de Egiin Gol, dans le Nord de la Mongolie, puis la nécropole aristocratique Xiongnu découverte à Gol Mod, dans le Nord de l'aïmag d'Arkhangaï, près de la rivière Khunnu on permit dans les années 1990 et 2000 d'avancer dans la compréhension de ces peuples. Sur ces sites, le sol est sableux et herbeux, on peut y trouver bouleau et mélèzes, daims, cerfs, chevreuils, élans, loups6,7